"Franchement, une canne de 5kg en Terra-Standard à 0,95G-Newton, cela me serait plus une charge qu'un aide... Toujours est-il que, si tu esquintes ma canne, j'en serais tout attristé..." S'tian tend sa main droite vers l'arrière, dissimulant de son corps immobile le mouvement. Le bois lourd arrive au contact de sa paume et il referme ses doigts dessus.
(C'est ça, oui, je vais m'en souvenir... Il est à la masse ou quoi ?)Il retient le haussement d'épaules qui serait fatal. Il n'a pas encore réussi à comprendre si l'homme à la canne fait de l'humour ou s'il est sérieux.
Il tient à présent la canne bien en main, le dos de sa main tourné vers l'avant. Les deux adultes se trouvent de part et d'autre de lui, en arrière. Devant, le chercheur-tueur continue sa patrouille. La clé de la victoire contre ce genre de piquant obstacle, c'est la rapidité associée à la force. La canne pèse lourd, presque trop pour que ses mouvements soient assez rapides, mais il n'y a pas le choix. Il calcule avec soin l'exécution du geste nécessaire tout en surveillant le parcours du chercheur-tueur. Ainsi s'écoulent de longs instants cependant que la tension monte.
Pshhhht...Il s'élance soudain, balançant son épaule droite vers l'avant dans un geste qui annonce l'ensemble de son assaut. Le chercheur-tueur s'oriente vers lui et bondit, accompagné d'un sifflement rageur. S'tian fait pivoter son bras vers l'avant, sa main agissant comme le bras de levier de la lourde canne. C'est le moment crucial : si elle lui échappe ou s'il ne parvient pas à lui imprimer un mouvement assez rapide, ses chances de s'en tirer seront plus que réduites.
L'extrémité de la canne tournoie et frappe à une vitesse prodigieuse le chercheur-tueur qui est projeté, tourbillonnant, sur la paroi de gauche qu'il heurte, avant de tomber vers le bas et le centre du couloir. S'tian donne un violent coup de reins pour s'équilibrer, projetant la lourde canne du haut vers le bas face à lui. Le chercheur-tueur, pris entre le sol et la pointe de la canne qui l'écrase avec toute la force d'un bélier, se disloque en deux morceaux, la pointe d'un côté, le bloc suspenseur de l'autre.
"Ombre et cendres !"Après avoir proféré ces mots à voix basse, S'tian ramène la canne vers l'arrière d'un geste vif. Il passe son avant-bras sur son front où perle la transpiration. L'ensemble de l'action n'a pas duré plus de quelques secondes mais il se sent épuisé. Il espère que leur route ne contiendra pas d'autres surprises telles que celle-ci, car manipuler des outils peu adéquats en situation de tension nerveuse aurait sans doute raison de sa résistance bien trop vite.
"Votre canne, chef."Il rend l'accessoire avec distraction car il ne veut pas commettre une erreur de débutant. Avançant son pied d'un centimètre en direction du chercheur-tueur brisé, il voit que la pointe frémit dans sa direction. Un petit sourire apparaît alors sur ses lèvres, à son seul bénéfice car les deux adultes sont toujours immobiles derrière lui. Leur faisant signe de ne pas bouger, il fait avec prudence deux pas en avant, juste ce qu'il faut pour être à la bonne distance de sa cible. Les chercheurs-tueurs disposent parfois d'un bloc suspenseur de secours à proximité de la pointe, le genre de piège dans le piège permettant de venir à bout de victimes méfiantes mais pas assez. Il n'a pas l'intention de se faire avoir.
S'tian ouvre ses vêtements et urine sur le chercheur-tueur. Son compagnon de gauche (le troisième larron) semble émettre un bruit surpris, mais dans la flaque qui s'agrandit, des éclairs miniatures apparaissent à la pointe de l'appareil brisé, illuminant le couloir obscur d'une clarté passagère. Le phénomène s'arrête presque aussitôt : cette fois-ci, le chercheur-tueur est bel et bien vaincu.
S'tian referme ses vêtements et annonce, en faisant un geste de sa main droite :
"Maintenant, on y va."