Les Commentaires du Dr. William McNelly sur l'Encyclopédie

Démarré par fredo, Juillet 22, 2005, 07:02:51 PM

« précédent - suivant »

Dunensis

ce texte montre que copyright et droit d'auteur c'est pas pareil. Mcnelly dit avoir trouv

renardrouge

Ouah! C'est effectivement hautement intéressant, je viens de me lancer dans le pdf de l'Encyclopédie (que j'ai curieusement immédiatement commencé par la fin) et une de mes 1ère interrogations en lisant l'article sur les Zensunnis était... mais d'ou viennent toutes ces informations, je ne me rappelle pas les avoir lu dans les livres - ou pas à ce point !!

Un grand Merci pour cet article qui m'éclaire :)

Par contre je vais passer du temps maintenant a en chasser une version papier sur ebay, parce que je ne vois pas comment je vais pouvoir vivre sans une vraie version papier. Ca c'est moins cool.  >:(

Filo

Ouah! Hautement intéressant!
C'est là qu'on s'aperçoit le crédit que Frank Herbert lui-même a accordé à l'ouvrage.
Merci beaucoup pour nous avoir permis de découvrir ce texte.
L'art est un travail ingrat,
mais il faut bien que quelqu'un le fasse.

fredo

Je suis tombé sur cet article sur le même site dont est tirée l'analyse du Sentier d'Or et me suis dit que cela pourrait être intéressant (et ça l'est !). Je l'ai donc vite traduit cette après-midi.

Article en anglais : http://p073.ezboard.com/fsistersreadingroomfrm37.showMessage?topicID=5.topic

The Dune Encyclopedia trouve ses origines dans une année sabbatique d?études que je pris en Angleterre en 1979. A cette époque, je prévoyais d?écrire un court ouvrage sur les travaux de Brian Aldiss, un livre qui ne fut jamais achevé mais, bien que ce soit là une autre histoire, plusieurs articles à son sujet furent tirés de cette étude. Je restai avec Brian et son adorable épouse (et bibliographe) Margareth dans leur maison dans le village de Begbroke, quelques kilomètres au nord d?Oxford, et passais mes journées à la Bodleian Library où je m?extasiais et parfois parcourais ses volumineux ouvrages, attendant déjà une étude définitive. Il semble que Brian garde une copie, carbone ou photocopie, de tout ce qu?il a jamais écrit ? un véritable trésor pour tous les futur candidats Ph.D(1)

Brian venait juste de terminer Life in the West, premier opus de la trilogie « Squires » - suivi par Forgotten Life et Remembrance Day ? (2) et me demanda d?en lire le manuscrit. Je le fit presque immédiatement, enchanté par la qualité de l?écriture, par ses évocations des temps révolus, des problèmes actuels et par les personnages uniques, un roman « généraliste » si différent de ses ouvrages de science-fiction écrits jusque là. Il est regrettable que ce roman de premier ordre n?ait été diffusé qu?en Amérique du Nord. Life in the West est une véritable ?uvre de génie, et je ne me privai pas de lui dire.

A coté de cela, Aldiss était en plein travail de préparation, de planification et de recherche sur l?énorme trilogie d?Helliconia, son chef-d??uvre de science-fiction, l?une des vraies merveilles du genre, dont l?écriture allait lui prendre toute la décennie suivante. Lui et moi passèrent un grand nombre d?heures accompagnées de pintes de Double Diamon à discuter de ses idées pour cette longue série de romans qui allaient englober des siècles, des changements infinis dans la morphologie des habitants de cette planète et comporter des aperçus incisifs de la nature de la réalité, de l?art, de la fiction et de l?humanité. A l?instar d?Herbert, Adliss semble constamment demander : « Que-est-ce donc que d?être humain ? ».

Quiconque a entièrement lu la trilogie d?Helliconia ? Helliconia l?été, L?hiver d?Helliconia, Le printemps d?Helliconia ? reconnaîtra immédiatement l?immense diversité de l?imagination, la richesse des lieux et la vaste panoplie de personnages, qu?Aldiss englobe dans ses romans. En plus d?inventer un système solaire avec deux soleils autour desquels la planète effectue une révolution complète en une « année » de deux mille ans, Aldiss pourvoit Helliconia d?histoires, de personnalités, de plantes, d?animaux, de civilisations et d?écologies si riches que nous remarquâmes quasi-simultanément que le concept même requérait une encyclopédie, ne serais-ce que pour garder l?ensemble cohérent. Des problèmes de droits d?auteur, dit-il, l?empêchèrent de présenter une Encyclopédie d?Helliconia introductive ; après tout, remarqua-t-il, on ne peut pas déposer quelque chose qui doit encore être écrit.

Peu de temps après être revenu à la maison une semaine plus tard, je considérai la possibilité d?une Encyclopédie de Dune. Bien que je sût qu?Herbert travaillait à cette époque sur ce que j?appelais « Dune 4 » - plus tard publié sous le titre de L?Empereur de Dune ? le cycle de Dune possédait déjà non seulement une grande diversité mais aussi des centaines de questions sans réponses et une qualité épique inégalée dans la science-fiction. Je me suis alors attablé devant ma machine à écrire pour proposer à Berkeley d?en éditer une.

Dans un exemple de synchronisation qui m?étonne encore, ce jour-là le facteur m?apporta une lettre de Peter Israel, le président de Putnam?s, la compagnie mère de Berkley, me demandant si je serais intéressé par l?écriture d?une Encyclopédie de Dune. Dans un geste que j?appréciai beaucoup, il m?indiqua que j?étais le seul intellectuel auquel Herbert ferait confiance pour un tel projet ; il suggéra également qu?il incluse « Dune 4 ».

Je lui fis immédiatement parvenir mon approbation enthousiaste, ne posant que des questions commerciales à propos des avances, des délais etc. Une semaine ou deux plus tard, je reçut la visite, ici en Californie, de Mme XXXX, la responsable d?alors de la publication SF de Berkley. Nous mîmes au point les derniers détails du contrat, parlâmes d?un temps de production de deux ans, de la longueur et de l?étendue du livre etc. On me laissa carte blanche, mes éventuelles questions devant se discuter avec FH par téléphone ou courrier.

Mon premier concept du livre était que ce serait une encyclopédie alphabétique ? Abomination à Zensunni ? qui se voudrait une description précise de l?univers de Dune, sans pour autant se référer à son créateur, Frank Patrick Herbert. Jamais. De quelque façon que ce fut.

Et il en fut ainsi.

Peu de temps après avoir reçu mon contrat et mon avance initiale, je me mis à réfléchir à certaines des complications posées par la compilation d?une Encyclopédie de Dune. J?en entrevis beaucoup dès le début mais de nombreuses autres apparurent à mesure que le travail progressait.

La plus important était le fait que FH n?avait pas encore terminé Dune 4 alors que le contrat spécifiait qu?on devrait couvrir « La trilogie de Dune et le volume de Dune à venir ». Ma première idée fut d?écrire toutes les entrées de Dune 4 d?après le manuscrit que j?allais recevoir de FH. Aucune problème me dis-je, Du gâteau. Doux rêveur !

Les détails financiers étaient également importants. Avec l?avance initiale, j?ouvris un compte-chèque à ma banque pour gérer l?argent qui serait utilisé pour payer les dépenses ou les contributeurs. Bien que l?avance s?élèverait à 20 000 $ après l?achèvement et acceptation du manuscrit par l?éditeur, j?aurais à payer les dépenses de ma poche après que l?avance initiale aurait été consommée. Entre nous, mes dépenses dépassaient de loin l?avance initiale. Mes factures de téléphone se chiffraient en centaines chaque mois ; mon nombre de photocopies était énorme et mes frais de port ? tous au tarif express bien sûr ? après les avoir additionnés, donnaient un résultat à quatre chiffre (et dans la fourchette haute). Et tout ceci avant que le premier essai ait été assigné ou que le premier contributeur ait été payé. Même si la majorité des contributeurs étaient des professeurs d?université et de lycée qui tiraient leurs revenus de ce métier, je savais qu?ils méritaient une rétribution. Pour emprunter les mots d?Harlan Ellison, ils étaient comme la prostituée qui aimait son travail : elle était pourtant toujours payée pour cela.

Après de considérables discussions avec certains de mes collègues de différents département à Cal State Fullerton, The Science Fiction Writers of America et The Sience Fiction Research Association, je décidai de payer chaque contributeur quatre cents un mot pour chaque essai accepté. Je dressai ensuite une esquisse de contrat « work for hire »(3) que je fis valider par les avocats de Berkley, et finis par l?adopter. Les lois sur les droits d?auteurs demandaient que j?utilise le système « work for hire » parce que Berkley/Putmans insistait pour que les droits sur le livre soient uniquement à mon nom. Des droits individuels pour chaque auteur n?étaient tout simplement pas une option.

Les autres problèmes incluaient comment gérer les détails des travaux écrits ; sélectionner des sujets potentiels, les assigner, les payer, s?assurer que chaque contributeur à propos, disons du Bene Gesserit, était au courant de ce que tout autre contributeur travaillant sur des sujets parallèles écrivait etc. L?auteur d?une entrée sur l?histoire du BG se devait de savoir ce qu?un autre auteur écrivait sur le gouvernement et l?organisation du BG, par exemple.

Avec l?aide de quelques amis proches et une re-lecture minutieuse des trois premiers livres, je produisis une première liste de 200 ou quelque sujets et fit estimer en gros à quel espace chacun aurait droit. Un article sur la production de l?épice devrait être plus court qu?un sur Paul Atréides.

A cause de la longueur suggérée du livre et du grand nombre d?articles prévus ? le contrat avec Berkley mentionnait le nombre de 250 000 mots, comme je l?ai déjà dit ? je pris plusieurs mesures pour garder la trace des matériels au fur et à mesure qu?ils sortaient et me revenaient. Premièrement, j?avais fait environ deux cent fiches de 5 par 7 (rappelez-vous, c?était dans les jours avant l?Apple IIE et les tableurs ou autres assistants n?existaient pas). Toutes contenaient le même en-tête : titre de l?entrée, longueur suggérée, date assignée et à qui, date d?assignement, date du retour de l?article, longueur finale, date de lecture de la copie, copies envoyées à d?autres contributeurs pour leur information etc., date de paiement, numéro du chèque etc.

J?ouvris également un compte à la photocopieuse la plus proche ; recrutai ma belle-fille, qui avait été une secrétaire professionnelle, pour taper à la machine et s?occuper des dossiers.

Trouver des écrivains fut un autre obstacle pour un volume planifié de 250 000 mots ; je finis donc par écrire à tous les membres de la Science Fiction Research et leur parlai du projet, leur donnant une liste des sujets projetés ; je leur demandai s?ils seraient intéressés pour contribuer à une ou plusieurs entrées du livre et si oui, lesquelles ? je leurs demandai également leurs idées pour des sujets supplémentaires.

Pendant que tout ceci était en route, je discutai de ces problèmes avec l?un de mes collègues à Cal State, mon ami proche, le Dr. Charles Povlovich, un fan de SF caché qui n?était pas seulement un historien militaire mais également un « maître des jeux » certifié et accrédité par l?Etat (il s?avéra qu?il y avait beaucoup de fans de SF cachés parmi mes collègues de Cal State ? dans des départements aussi variés que la géologie, l?orthophonie, l?éducation, la bibliothèque et même un ou deux dans ce que j?aime à appeler l? « administrivia »).

Charles avait arbitré des tournois de bridge, par exemple, et était également un expert certifié du Robert?s Rule of Order (4). En tant que joueur, il se porta immédiatement volontaire pour écrire l?article sur le « Cheops ». Il me le présenta le jour suivant et je l?appréciai tellement que j?en envoyai une copie à chaque contributeur futur en disant : « Allez et faites de même » (c?est imprimé ainsi, inchangé, dans l?Encyclopédie). Si vous la re-lisez, vous remarquerez comment il n?explique jamais comment jouer au jeu mais parle de son histoire, de son développement et ainsi de suite, tout cela dans un style très universitaire. Notez également sa fine blague : « Même le grand Garan Akbar commit une fois une éclipse prématurée? ». C?était le ton que j?aimais, si légèrement irrévérent, et dans ma première lettre, je poussai tous les contributeurs à l?imiter.

Avec ma première lettre aux futurs contributeurs, dans laquelle je leur demandais de se risquer à des affirmations sur des sujets différents, j?insistai sur plusieurs règles de base : il ne doit y avoir aucune mention de FH ou d?aucuns de ses livres dans leurs articles ; le ton des articles doit être érudit, encyclopédiste, authentique en supposant que tout ce qui est dit dans les quatre premiers livres est vrai. J?insistai également pour que toutes les mesures suivent le système métrique.

Quelle allait être la source de toutes ces informations ? Je partis au début sur l?idée d?Archives Atréides et d?une bibliothèque sur Caladan, et je dis à FH au téléphone que j?allais faire comme cela. Il me dit de ne pas m?inquiéter, que Dune 4 incluait un mécanisme ? les non-espaces s?avéra-t-il ? qui pourrait être cité par tous les contributeurs comme source. J?étais préoccupé par le timing mais la publication imminente de l?Empereur-Dieu de Dune résolvait non seulement le problème de la « source » mais permettait à d?autres contributeurs d?écrire des entrées sur ce livre. J?encourageai également les contributeurs à suggérer des sujets que j?aurais pu oublier ou qui semblaient importants pour eux. De leurs suggestions vinrent des matériels réellement originaux tels que la littérature, la musique et la poésie de l?Imperium, le Shakespeare (nous l?appelâmes « Harq al Harba », qui est le terme arabe pour Shakespeare) de l?Imperium, la menstruation chez les fremen (frewomen ?) et ainsi de suite. Je laissai carte blanche aux écrivains et il firent plus que de me rembourser pour cela. Du matériel de l?Empereur-Dieu de Dune, par exemple, donna à un auteur l?idée que de brèves biographies sur les différents Duncan Idahos pourrait être intéressante ; un autre suggéra que les Grandes Maisons pourraient avoir des emblèmes ? et qu?elles pourraient être illustrées ; un autre encore prit la notion assez peu développée du Tarot de Dune et voulut la développer ? une fois de plus avec des illustrations.

Peu de temps après avoir reçu le contrat signé, je me rendis à Port Townsend pour passez un long week-end avec FH à discuter les divers problèmes que nous entrevoyions tous deux. J?enregistrai environ huit heures de nos conversations ; elles font maintenant partie des Archives Herbert à la Special Collection Library de Cal State Fullerton. Une partie cruciale de ces conversations fut la certitude que FH me faisait confiance pour rester fidèle à l?esprit des livres ? après tout, il avait dit à Berkley/Putman?s que j?étais le seul intellectuel auquel il ferait confiance pour compiler une Encyclopédie de Dune. Si jamais j?avais une question d?importance, j?en trouvais la réponse avec lui mais autrement, j?avais les mains libres.

Avec un scintillement dans ses yeux, il expliqua que la source du matériel pour l?Encyclopédie elle-même ? l?hypothétique non-espace ? avait été assemblée par Leto II en personne. Ainsi, n?importe quel conflit ou contradiction pouvait aisément être attribué aux préjugés ou préférences de Leto lui-même. (C?est d?ailleurs l?un de mes plus grands regrets que le seul article d?importance supprimé par l?éditeur fut celui sur une « vie extra-terrestre » - qui racontait la découverte d?un autre non-espace dans une autre galaxie?).

Y-a-t-il des erreurs dans l?Encyclopédie de Dune ? Bien entendu. Bien que j?ai attentivement lu et re-lu chaque article au moins quatre ou cinq fois et qu?un second lecteur repassait pas derrière au moins encore une fois de plus, un diablotin occasionnel se glissait à travers. Je suppose que je suis responsable des erreurs qui se retrouvèrent dans l?édition finale (laissons les lecteurs les découvrir ? Je ne les révèlerai pas) pourtant j?aime à voir Leto II et son sourire arthropode comme amusant juste une fois encore.

Et blâmez-le. Ou, comme Chaucer le dit : « Ne me blâmez-pas. »

(1)   ? Abréviation pour Philosophiæ Doctor
(2)   ? Il s?agit en fait d?une tétralogie, les trois premiers tomes cités ci-dessus ne sont jamais sortis en France, seul le dernier : Somewhere East of Life (A l?est de la vie) a été traduit.
(3)   ? Il s?agit d?une doctrine typiquement anglo-saxonne : celui qui paie est naturellement propriétaire de ce qu?il a commandé.
(4)   ? Ouvrage juridique.

Je pense que je le rajouterai également au site.